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Trouver le contexte idéal pour les titres de créance des marchés émergents en monnaie locale

Nous examinons les quatre étapes du cycle typique des titres de créance en monnaie locale de marchés émergents, le cadre fondamental du marché et les occasions potentielles offertes aux investisseurs d’aujourd’hui.

Quelles sont les différences structurelles entre les titres de créance libellés en dollars et les titres de créance des marchés émergents en monnaie locale?
Les titres de créance en monnaie locale sont libellés en monnaie du pays où ils sont émis. Si vous offrez des prêts en monnaie locale au gouvernement brésilien, vous effectuerez un prêt en réaux brésiliens plutôt qu’en dollars américains. Différents facteurs influent sur les titres de créance en monnaie locale. Le principal facteur est l’inflation. Les titres de créance en monnaie locale se comportent comme des titres du Trésor américain. Lorsque la Réserve fédérale américaine relève les taux, les taux des obligations du Trésor augmentent, tandis que leurs prix baissent. C’est le cas des titres de créance en monnaie locale dans tous les marchés émergents. Au Brésil, lorsque la banque centrale a relevé les taux d’intérêt au cours de la dernière année, les prix des obligations libellées en monnaie locale ont chuté. Il s’agit de la principale différence : l’inflation et le cycle économique local n’ont pas d’incidence sur les titres de créance en dollars américains, car ils sont libellés en dollars américains. L’inflation à l’échelle locale n’a pas d’importance. Ce qui influe sur les titres de créance en dollars, c’est surtout le risque de défaillance des dettes souveraines, qui, bien sûr, pourraient aussi avoir une incidence sur les titres de créance en monnaie locale. Les titres de créance en monnaie locale s’apparentent aux titres de créance en dollars, mais ils font aussi face à une composante d’inflation liée au cycle économique.

Vous avez mentionné l’inflation et le cycle économique. Quels autres indicateurs de rendement clés sont importants pour vous?
Un solide cadre macroéconomique est nécessaire. Le déficit budgétaire est sur une trajectoire durable. La dette est stable ou en baisse. Lorsque c’est le cas, la crédibilité de l’inflation est habituellement élevée. L’inflation est bien ancrée et la cible d’inflation du pays est crédible. C’est le scénario idéal. Même si peu de marchés émergents sont idéaux, nous sommes à la recherche de pays qui se dirigent dans cette direction.

Le cadre budgétaire s’est-il amélioré pour cette catégorie d’actif?
Absolument. À la fin des années 1990 et au début des années 2000, il y a eu plusieurs crises dans les marchés émergents. Le cadre macroéconomique était très différent. Il était fondé sur des taux de change fixes qui n’étaient pas viables. Les pays se sont débarrassés des taux de change fixes, ont adopté des cibles d’inflation et sont devenus plus crédibles dans leurs politiques budgétaires. Par conséquent, les cibles d’inflation sont également devenues crédibles. Au cours des 10 années précédant la pandémie, les taux d’inflation réels dans les marchés émergents ont diminué de façon constante, en partie en raison de la solidité des cadres macroéconomiques. Cette amélioration globale du cadre macroéconomique et de l’inflation explique pourquoi la catégorie d’actif se porte si bien depuis longtemps.

Pouvez-vous nous expliquer les quatre étapes du cycle des titres de créance de marchés émergents en monnaie locale?
Dans tout cycle économique, si l’inflation est trop élevée, la banque centrale relève les taux d’intérêt. Si l’économie entre en récession, la banque centrale réduit les taux d’intérêt. Le cycle économique des marchés émergents est lié à l’économie américaine. Si la Fed relève les taux et que la banque centrale d’un marché émergent ne le fait pas, sa monnaie se dépréciera probablement. Si la monnaie se déprécie, il arrive que l’inflation augmente dans ce pays, ce qui force la banque centrale à relever ses taux.

Habituellement, au début de la première étape, les taux d’intérêt aux États-Unis sont faibles, l’économie américaine se redresse et la Fed commence à relever les taux. À la deuxième étape, la Fed continue de relever les taux, ceux-ci deviennent plus restrictifs et les marchés émergents commencent à en ressentir les effets. Leurs monnaies se déprécient et leurs banques centrales relèvent également les taux d’intérêt. Au cours de la troisième étape, la Fed met sur pause son cycle de hausse et deux résultats sont possibles: un atterrissage en douceur ou un atterrissage brutal. Les deux options mènent à la quatrième étape, qui est la réduction des taux par la Fed. Lors d’un atterrissage en douceur, l’inflation diminue, mais il n’y a pas de récession. Comme l’inflation diminue, la Fed commence à réduire les taux. Le deuxième résultat possible pour la quatrième étape est l’atterrissage brutal. L’économie américaine entre en récession et la Fed réduit les taux de façon plus dynamique. Dans les deux cas, les banques centrales des marchés émergents réduiront également leurs taux. 

Les banques centrales commencent à réduire les taux d’intérêt, ce qui constitue un point d’entrée intéressant pour les titres de créance en monnaie locale. Une fois que la Fed en aura fait assez pour stabiliser l’appétit pour le risque, nous commencerons à voir des capitaux affluer vers les marchés émergents et le dollar se déprécier. Les monnaies des marchés émergents commenceront à s’apprécier, ce qui favorisera la désinflation et permettra aux banques centrales de réduire davantage leurs taux. On commence à voir une croissance et l’investissement de capitaux. En réalité, la quatrième étape crée une boucle de rétroaction positive.

Les actifs à risque et l’économie réelle (la forme des courbes des taux des obligations souveraines) envoient des signaux contradictoires. Que pensez-vous de l’économie mondiale? Qu’est-ce que cela signifie pour la Fed et les banques centrales?
La priorité des banques centrales est de réduire l’inflation, même si cela mène à une récession. Je pense qu’il y a une forte probabilité de récession. Les banques centrales se fient sur les indicateurs retardés, comme l’inflation de base, pour évaluer leurs ajustements de politique, ce qui signifie qu’il est peu probable qu’elles procèdent à des réductions avant que le chômage ne commence à augmenter. La hausse du chômage représente en fait le début d’une récession et, historiquement, une fois qu’il commence à augmenter, il augmente généralement beaucoup. Je crois que la conjoncture macroéconomique présente une forte probabilité de récession.
Du côté des placements, la question est de savoir quels actifs peuvent compenser le risque de récession. Nous discutons souvent avec nos collègues de la possibilité d’un atterrissage en douceur. Même si les perspectives d’un atterrissage en douceur sont plus nébuleuses, cette situation pourrait tout de même se produire. Si c’était le cas, les actifs risqués se porteraient plutôt bien. En ce qui concerne les titres de créance des marchés émergents, seule une partie de la catégorie d’actif tient compte d’un atterrissage brutal, mais elle ne tient pas non plus entièrement compte d’un atterrissage en douceur. Je pense donc qu’il est possible que cette catégorie d’actif et d’autres se redressent à un certain point dans un contexte d’atterrissage en douceur. Cependant, les actifs à risque ne pourraient pas compenser l’incidence d’un atterrissage brutal. Nous pensons qu’il est avantageux de faire preuve de prudence à l’égard d’un grand nombre d’actifs, surtout en ce qui a trait à la répartition du risque, car peu d’actifs compensent la probabilité d’un atterrissage brutal, qui, selon moi, est assez élevée.

Pour ce qui est des titres de créance des marchés émergents et des occasions qui s’y présentent, pourquoi les investisseurs devraient-ils y penser maintenant?
Nous avons parlé du cycle normal : première étape, hausse des taux par la Fed, deuxième étape, hausse des taux parles banques centrales des marchés émergents. Le cycle actuel comporte cependant des différences. Les étapes un et deux étaient inversées cette fois-ci. Les banques centrales des marchés émergents ont nettement devancé la Fed. C’est assez remarquable. Habituellement, lorsque la Fed relève les taux, les monnaies des marchés émergents sont très faibles. Ce n’était pas le cas l’an dernier. Oui, le dollar a été très vigoureux, mais il l’a été par rapport à l’euro et aux autres pays développés. Les marchés émergents ont enregistré des résultats semblables à ces pays et ont même surpassé l’euro l’an dernier. Ils ont réussi cela parce que les banques centrales des marchés émergents ont commencé à relever leurs taux avant la Fed et la Banque centrale européenne (BCE). Cela les place dans une situation très différente. Si nous nous dirigeons vers un atterrissage brutal, les banques centrales des marchés émergents pourraient effectuer d’importantes réductions des taux. Actuellement, le taux directeur du Brésil est de 13,5 %, tandis que l’inflation est inférieure à 4 %. La banque centrale du pays a resserré la politique monétaire plus tôt et dans une plus grande mesure. Il s’agit d’un énorme coussin. 

Au début de la quatrième étape, l’aversion pour le risque signifie généralement que les investisseurs veulent se tourner de nouveau vers le dollar. Cet enthousiasme pour le dollar peut être problématique pour les banques centrales des marchés émergents. Aujourd’hui, cependant, les banques centrales des marchés émergents ont tellement augmenté leurs taux qu’elles ont mis en place un important coussin contre le risque en cas de récession et de flambée de l’aversion pour le risque, ce qui devrait contribuer à stabiliser les monnaies de ces pays. Dans le passé, les banques centrales des marchés émergents étaient à la traîne par rapport à la Fed, les actifs à risque étaient liquidés et les banques centrales devaient relever leurs taux encore plus. C’est la situation habituelle, mais je ne crois pas qu’elle se déroulera de la même manière cette fois, car les banques centrales des marchés émergents ont commencé le cycle de hausse avant la Fed. Elles sont bien placées et peuvent encore réduire les taux. Lorsque la Fed adoptera une attitude plus conciliante, les banques centrales des marchés émergents obtiendront le feu vert et auront une grande marge de manœuvre pour réduire leurs taux. Une certaine faiblesse du dollar devrait ensuite faire son apparition. C’est à ce moment que les rendements des titres en monnaie locale de marchés émergents pourraient être très bons. 

Conclusion
Comme nous l’avons vu, les titres de créance en monnaie locale traversent les cycles économiques typiques. Il y en a eu quatre au cours des 20 dernières années, et à l’heure actuelle, nous approchons de l’une des étapes du cycle où les rendements peuvent être plutôt favorables pour les titres de créance en monnaie locale de marchés émergents. Les investisseurs devraient rester à l’affût de ces occasions.

Nous avons parlé des pays dont les besoins de financement, les sources de revenus et les cycles économiques sont différents, mais sont tous liés à la Fed. Quelle est l’importance de la recherche fondamentale et de la sélection des titres?
J’ai généralisé une partie de ce dont nous avons parlé. Ce n’est pas vrai pour tous les pays des marchés émergents. La sélection des pays est un élément clé de l’investissement dans les titres de créance des marchés émergents. Il est extrêmement important de connaître les pays dont le profil de risque des obligations souveraines est fragile. Ces pays pourraient aussi réduire les taux. Cependant, s’ils ont un problème de dette souveraine, cette réduction de taux sera suspendue et pourrait aller dans l’autre sens. Nous avons vu cette situation se produire à maintes reprises. Il faut se méfier des pays vulnérables. En même temps, il faut également avoir exercé une sélection judicieuse de pays pour trouver les titres de la catégorie d’actif qui présentent le plus grand potentiel de gains. 

Nous ne surpondérons pas la durée partout dans la catégorie d’actif. Il existe des occasions intéressantes qui, selon nous, domineront l’indice. Cependant, il y a aussi des régions, comme une grande partie de l’Asie, où il n’y a pas d’occasions liées au cycle de réduction des taux, et nous sommes très prudents à cet égard. 

 

 

Les points de vue exprimés sont ceux du ou des auteurs et peuvent changer sans préavis. Ils sont fournis à titre indicatif seulement et ne doivent pas être considérés comme une recommandation d’achat d’un titre, une sollicitation ou un conseil en placement. Les prévisions ne sont pas garanties.

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