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Quelle catégorie fait fausse route : les actions ou les obligations?

Soit les taux de rendement réels sont trop élevés aux États-Unis, soit les évaluations boursières sont nettement supérieures à leur juste valeur. Les investisseurs qui peuvent comprendre quelles entreprises offrent une valeur réelle et lesquelles n’en offrent pas se retrouveront dans une position enviable par rapport à l’ensemble du marché.

En résumé

  • Soit les taux de rendement réels sont trop élevés aux États-Unis, soit les évaluations boursières sont nettement supérieures à leur juste valeur.
  • Et si les évaluations boursières reflétaient la promesse de l’intelligence artificielle (IA)?L’histoire montre que les entreprises établies ne sortent pas toujours gagnantes.
  • Dans ce nouveau paradigme, l’acteur le moins fort échouera et cédera ses parts de revenus et ses sources de bénéfices aux plus aptes. 

Un grand investisseur a déjà affirmé que « tout placement est axé sur la valeur ». Il avait raison, puisque payer des titres trop cher s’est avéré un obstacle de taille à surmonter. La difficulté consiste à évaluer la véritable « valeur » compte tenu de la vaste gamme de variables qui peuvent influer sur l’avenir d’une entreprise, qu’elle soit nouvelle ou ancienne, en particulier dans un monde en plein changement. 

J’écris rarement à propos des évaluations boursières, comme les ratios cours/bénéfice prévisionnels ou des 12 derniers mois, la principale raison étant qu’il ne s’agit pas de mesures de la valeur. Elles ne servent qu’à comparer la valeur relative entre des groupes d’actifs financiers. Ce sont des ratios mathématiques à court terme qui sont surutilisés par des investisseurs n’ayant pas la capacité ou le temps nécessaire pour bien comprendre le fonctionnement interne complexe et la valeur d’une entreprise.

Qu’il s’agisse de placements publics ou privés, ou d’actions ou de titres de créance, tous les actifs à risque doivent rémunérer les investisseurs non seulement pour la possibilité d’une perte en capital, mais aussi pour le temps. Le capitalisme ne fonctionne que lorsque les épargnants et les investisseurs sont récompensés pour avoir immobilisé leur argent. Les taux d’intérêt représentent le prix du temps et sont intégrés à la valeur de chaque actif risqué. C’est ce qui explique la relation entre les taux d’intérêt et les évaluations des actifs. 

Cette relation est rompue

La ligne bleu foncé, mesurée par l’axe de gauche, est le taux de rendement (inversé) des obligations du Trésor américain à 10 ans protégées contre l’inflation. Nous l’utilisons comme indicateur des taux réels prévus aux États-Unis. La ligne bleu pâle, mesurée par l’axe de droite, représente le ratio cours/bénéfice prévisionnel sur 12 mois de l’indice S&P 500.

La relation est simple. Lorsque les taux d’intérêt baissent, la valeur des flux de trésorerie futurs augmente et fait grimper les évaluations boursières. C’est ce que montre le graphique. Les mesures de confinement pendant la pandémie ont permis aux banques centrales de se prémunir en vue d’une répression financière accrue. Les taux de rendement réels sont passés d’environ 1 % (avant la pandémie) à un chiffre négatif et les actifs risqués ont réagi positivement. 

La relation va aussi dans l’autre sens. Après l’embuscade inflationniste de 2022, les évaluations boursières se sont effondrées afin de rémunérer les investisseurs pour la compétitivité croissante des taux de rendement sans risque. 

Notre cercle souligne l’échec de cette relation générale. Soit les taux de rendement réels sont trop élevés à un niveau plus normal sur le plan historique de 2 %, soit les évaluations boursières sont nettement supérieures à leur juste valeur. Autrement dit, le marché obligataire envoie des signaux très différents de ceux du marché boursier. 

Si le marché obligataire a raison, qu’est-ce qui échappe au marché boursier?

Le paradigme des dernières décennies, caractérisé par des capitaux abondants et abordables, une main-d’œuvre bon marché et de faibles dépenses en immobilisations qui ont propulsé les marges bénéficiaires à des sommets records, a pris fin. Extrapolant peut-être de manière fallacieuse, des investisseurs en actions supposent que ces facteurs favorables aux bénéfices se maintiendront. 

Toutefois, la triste réalité est qu’ils représentent maintenant des obstacles aux bénéfices. Le crédit est devenu rare et cher. Même si l’endettement net des sociétés semble raisonnable en regard des bénéfices des 12 derniers mois, les investisseurs devraient envisager leur effet de levier en fonction de bénéfices normalisés, et non records. De plus, même si de nombreux titres de créance sont venus à échéance durant la pandémie, les événements de crédit découlent rarement des échéances et sont habituellement liés à des structures de capital non durables. À l’approche de 2024, les investisseurs commenceront à intégrer des coûts en capital nettement plus élevés à leurs modèles de flux de trésorerie disponibles. Les dettes élevées accumulées sur de nombreuses années ont servi à accroître les flux de trésorerie existants plutôt qu’à investir dans de nouvelles sources de revenus. Ces dettes devront probablement être remboursées à des coûts beaucoup plus élevés et avec moins de revenus.

La main-d’œuvre aussi est maintenant rare et représente une dépense importante qui aura un impact sur les bénéfices futurs. Cette année, les États-Unis enregistrent en moyenne une faillite chaque jour ouvrable ou deux, car les sociétés croulent sous le poids de leur dette ou échouent simplement parce que leur modèle d’affaires n’est pas viable dans un monde où les capitaux sont limités. Les coûts de la main-d’œuvre devraient se normaliser à mesure que l’équilibre est rétabli, mais ce pourrait être un long processus. D’ici là, les dépenses en main-d’œuvre pèseront sur les rendements. 

Et si le marché obligataire faisait fausse route?

Peut-être que l’écart d’évaluation est stimulé par l’IA, dont le marché obligataire sous-évalue les effets? 

Même si c’est une possibilité, le passé a montré que les gains de productivité s’estompent ultimement en raison de la concurrence. Même si les sociétés profitent d’une hausse initiale des bénéfices grâce aux nouvelles technologies et que la main-d’œuvre est en mesure de produire davantage avec moins, les nouveaux venus qui ont de nouvelles idées sur le marché changent souvent la dynamique du secteur, et ces gains diminuent. 

Les perturbateurs et les innovateurs ont tendance à tirer parti des nouvelles technologies et à usurper la proposition de valeur des entreprises déjà établies. Selon nous, même si l’IA peut provoquer un changement graduel de la façon dont les sociétés fonctionnent, elle pourrait permettre l’émergence de tout un nouveau groupe d’entreprises qui viendrait mettre en péril certaines des sociétés existantes qui polluent les indices de référence. C’est pourquoi nous sommes fermement convaincus de la valeur future de la gestion active.

Au cours de la prochaine période de tensions financières, les banques centrales reviendront-elles à la répression financière et à la socialisation des pertes? 

Bien que tout soit possible, cela nous semble peu probable. Il est utile ici de différencier les désirs et les contraintes. Autrement dit, les décideurs pourraient « vouloir » réduire les taux, mais le peuvent-ils réellement? 

Comparativement aux épisodes précédents, la plupart des économies avancées sont confrontées à des ratios dette/PIB élevés et à des déficits budgétaires qui montent en flèche. Cette situation pourrait imposer de nouvelles contraintes aux décideurs, car les investisseurs en obligations sont de toute évidence de retour après des années de léthargie. Les gouvernements, tout comme les actifs risqués, doivent rivaliser pour obtenir le capital des épargnants et, eux aussi, sont maintenant à la merci du marché obligataire. 

Conclusion

Pour une myriade de raisons, les marchés boursiers tardent généralement à prendre en compte les résultats financiers indésirables. Ceux et celles qui lisent fréquemment nos commentaires se souviendront des remarques antérieures à ce sujet. Même si les taux, à court ou à long terme, nominaux ou réels, peuvent fluctuer à la hausse ou à la baisse dans une certaine mesure, le paradigme a changé, et nous estimons qu’il est très peu probable que les taux reviennent à leurs creux antérieurs. 

Le nouveau paradigme sera différent du précédent. Les entreprises les moins performantes ont réussi à survivre en raison des coûts réduits. Mais les coûts ne sont plus réduits et continuent d’augmenter, ce qui crée des tensions. Dans ce nouveau paradigme, l’acteur le moins fort échouera et cédera ses parts de revenus et ses sources de bénéfices aux plus aptes. 

Les investisseurs qui peuvent comprendre quelles entreprises offrent une valeur réelle et lesquelles n’en offrent pas se retrouveront dans une position enviable par rapport à l’ensemble du marché.

 

Source : Bloomberg Index Services Limited. BLOOMBERGMD est une marque de commerce et de service de Bloomberg Finance L.P. et de ses sociétés affiliées (collectivement « Bloomberg »). Bloomberg ou les concédants de licence de Bloomberg détiennent tous les droits patrimoniaux des indices Bloomberg. Bloomberg n’approuve ni n’endosse ce document, n’offre de garantie quant à l’exactitude ou l’exhaustivité des renseignements qu’il contient ou n’offre de garantie, expresse ou implicite, relativement aux résultats pouvant être obtenus par suite de leur utilisation et, dans toute la mesure où cela est permis par la loi, ne saurait être tenue responsable des préjudices ou dommages pouvant en découler.

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