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Fin de la baisse de l’intensité capitalistique

Rob Almeida examine comment le passage de l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement à la résilience influera probablement sur le rendement du capital investi des sociétés. Quels types de sociétés sont en mesure de composer avec ce changement de paradigme et lesquelles ne le sont pas?Le gestionnaire de portefeuille de titres à revenu fixe de MFS Alex Mackey nous fait part de son point de vue sur les marchés obligataires imposables d’aujourd’hui et des principales considérations pour les investisseurs en titres à revenu fixe à l’aube de 2023.

En résumé

  • En raison de la mondialisation, l’intensité capitalistique est en baisse depuis des décennies. 
  • Cette tendance s’inverse, car les sociétés modifient leurs chaînes d’approvisionnement et augmentent leurs dépenses en immobilisations.
  • Certaines sociétés s’adapteront bien à ce changement, mais pas toutes.

L’embuscade inflationniste de 2022 a mis fin à une trajectoire baissière des taux d’intérêt qui dure depuis des décennies. Bien que les taux puissent diminuer un peu, car les effets des conditions financières serrées pèsent sur la demande globale et la croissance économique, nous ne croyons pas que le niveau du coût du capital à l’avenir ressemblera aux niveaux des dernières années, lors desquelles les banques centrales ont fixé artificiellement les prix courants au moyen de l’assouplissement quantitatif. Tout comme l’eau finira par se niveler, à mon avis, les taux d’intérêt finiront par se niveler à un haut niveau.

En raison de la hausse des coûts en capital, les sociétés auront de la difficulté à répondre aux attentes des investisseurs. Dans le passé, nous avons fait valoir que cette situation s’inscrivait dans le cadre d’un important changement de paradigme, qui consiste à passer d’un rendement du capital supérieur et facile à obtenir à un rendement inférieur et plus difficile à obtenir. Bien que les coûts d’emprunt élevés représentent le plus important changement, ils ne sont pas le seul facteur qui explique le changement de paradigme. La présente note se concentre sur l’un des autres facteurs : une augmentation à long terme des dépenses en immobilisations et l’Incidence qu’elle pourrait avoir sur les bénéfices. 

La baisse de l’intensité capitalistique est chose du passé

La mondialisation, en particulier l’émergence de la Chine sur la scène mondiale au milieu des années 1990 en tant que fabricant à faible coût, a changé la donne. Bien qu’elle ait propulsé la Chine de la dormance économique à la deuxième économie mondiale, son incidence s’est étendue bien au-delà de ce pays, car elle a permis aux sociétés des marchés développés de devenir de facto des sociétés exigeant peu d’actifs en externalisant leurs activités de fabrication à des endroits où les coûts sont inférieurs. 

Les sociétés n’avaient plus besoin de reconstituer leurs immobilisations corporelles, car la Chine, et l’Asie plus généralement l’ont fait pour elles. Par conséquent, l’intensité capitalistique (les immobilisations comparées aux revenus) a diminué de façon constante, comme il est décrit ci-après.

Ce point est important, car il existe une relation inverse et à long terme entre les dépenses en immobilisations et le rendement du capital investi. Lorsque l’intensité capitalistique diminue,  toutes choses étant égales par ailleurs, les rendements augmentent parce que moins de capital a été déployé. Par ailleurs, l’externalisation de la production a également exercé des pressions sur les charges d’exploitation en raison de la diminution des besoins en capital humain. 

La combinaison du levier financier au moyen de taux artificiellement réduits et de la baisse des investissements fixes a favorisé des rendements historiques pour les actionnaires. Mais cela s’est fait au détriment des épargnants et de la main-d’œuvre, et a exacerbé l’inégalité des revenus. Ces deux tendances ont pris fin.

Nous assisterons à une augmentation de l’intensité capitalistique

La pandémie, et par après, la guerre entre la Russie et l’Ukraine, ont exposé le risque de ne pas avoir de marchandises à vendre lorsque les consommateurs en veulent. Pour fabriquer une voiture, il faut des milliers de pièces, mais il suffit d’une pièce manquante pour arrêter la production. Pour les sociétés, il est devenu plus important d’offrir un produit à faible marge que d’avoir des étagères vides sur lesquelles il devrait y avoir un produit à marge maximale. La construction d’usines de  semi-conducteurs et de véhicules électriques a retenu l’attention des médias, mais la relocalisation et l’augmentation de la capacité se sont étendues aux produits électriques, aux produits chimiques, à l’équipement médical et à bien d’autres produits. Les sociétés (outre celles des secteurs technologique et automobile) dépensent aussi de l’argent. 

La guerre froide entre les États-Unis et la Chine et, plus récemment, la guerre au Moyen-Orient ont accentué ce risque. Nous pouvons nous attendre à ce que la démondialisation (dont l’ampleur est incertaine) réoriente des capitaux — qui, ces dernières années, ont été retournés aux actionnaires sous forme de dividendes, de rachats d’actions et d’acquisitions — vers des investissements fixes. Les rendements futurs devraient pâtir de cette situation.

Pourquoi est-ce important?

Bien qu’à court terme, les mesures influant sur les activités de négociation, comme les données mensuelles sur la main-d’œuvre ou l’inflation, dictent les prix des actifs, à long terme, c’est le rendement du capital qui compte. Le passage de l’efficacité de la chaîne d’approvisionnement à la résilience signifie que les sociétés qui manquent d’immobilisations corporelles devront effectuer des dépenses en immobilisations qui pèseront sur les rendements. 

Tout comme les investisseurs, les sociétés sont des répartiteurs de capital. Le marché les juge par le cours de leurs actions et obligations. Nous sortons d’un contexte où les conséquences des mauvaises décisions ont été atténuées par les effets favorables des taux artificiellement réduits et de la mondialisation. Nous entrons actuellement dans un contexte assorti d’une marge d’erreur réduite.

Les rendements pourraient s’avérer résilients pour les sociétés dirigées par de judicieux décideurs qui ont compris que les capitaux bon marché et les chaînes d’approvisionnement tendues de l’ère COVID-19 n’étaient pas viables. Toutefois, les sociétés qui ont des besoins en capital élevés et sont lourdement endettées pourraient décevoir. Comme les rendements dictent les prix des actifs financiers, un changement de paradigme quant à l’importance de la sélection des titres et de la gestion active devrait aussi s’opérer.

 

Les points de vue exprimés sont ceux du ou des auteurs et peuvent changer sans préavis. Ils sont fournis à titre indicatif seulement et ne doivent pas être considérés comme une recommandation d’achat d’un titre, une sollicitation ou un conseil en placement. Les prévisions ne sont pas garanties.

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